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Réflexion sur le village idéal

dimanche 12 octobre 2014, par Delpech

À la question : "Quel serait le village idéal ?", il serait probablement répondu : "un village qui ne soit pas un village dortoir, un village vivant, calme et verdoyant, où il fait bon vivre"...

L’image est aussi séduisante que délicate à réaliser.

Ne pas être un village dortoir est la tarte à la crème de tous les élus qui font semblant de croire qu’il suffit d’organiser quelques joyeuses kermesses pour sortir du schéma. À leur décharge, il faut reconnaître qu’ils ne sont pas responsables de modes de vie sur lesquels ils n’ont pas de prise.

Lorsqu’on oppose le village vivant au village dortoir, il est évident que l’image du village d’autrefois n’est pas sans influence sur ce que l’on voudrait pour aujourd’hui et pour demain ; au moins pour les générations qui en ont encore le souvenir et, peut-être, une certaine nostalgie.

Ce côté "vivant" était le résultat de modes de vie bien caractérisés :
- une économie basée sur l’agriculture, peu mécanisée à tendance autarcique avec ses satellites : artisanat et petit commerce ;
- des niveaux de population assez stables dans le temps ;
- des populations relativement peu mobiles avec une aire de répartition familiale restreinte ;
- une société certes hiérarchisée mais économiquement interdépendante.
Ce monde a disparu et il est illusoire de croire que l’on pourrait retrouver le modèle des relations humaines qui le caractérisait.

Dorénavant, il faut faire avec des populations fondamentalement différentes, très majoritairement issues du monde urbain, sociologiquement et culturellement hétérogènes, avec un niveau mobilité élevé : ces populations travaillent loin de leur résidence ; leurs vacances et loisirs se passent aussi, pour l’essentiel, loin de leur résidence. Leurs attaches familiales sont généralement dispersées aux quatre points cardinaux et même leurs lieux d’approvisionnement, alimentaire ou autre, sont très extérieurs à la commune.
Tout le monde conviendra qu’il est difficile d’avoir une vie de village intense avec des habitants qui ne font qu’y passer. Et cela, malgré une vie associative de bon niveau, associée à quelques "saucisses parties". Je pense que, dans ce contexte, il faudra s’accommoder de relations distendues et plutôt superficielles.

Autre point régulièrement évoqué pour dynamiser la vie du village : les commerces.
C’est certainement vrai mais à deux conditions :
- un certain volume de population pour assurer un minimum de rentabilité ;
- que les habitants s’approvisionnent dans ces commerces (ce qui est peu la règle pour les populations d’actifs qui, par souci d’économie, de temps, ou pour son côté pratique, choisissent généralement les grandes surfaces).
Autrement dit, tant que le village n’a pas atteint la dimension d’une petite ville autorisant un certain niveau de ces services, la cause est illusoire.
Cela sera alors à opposer au village calme et verdoyant puisque ces deux éléments dépendent du niveau d’urbanisation. Plus d’urbanisation c’est plus de béton donc moins de verdure. Et le niveau des "incivilités" étant proportionnel au nombre d’habitants, plus d’urbanisation c’est plus d’habitants donc moins de calme.

Au-delà de l’intérêt des vendeurs et des aspirations expansionnistes de beaucoup d’élus, ce niveau d’urbanisation est aussi tributaire du statut des sols non dédiés à l’habitat.
De façon générale, un propriétaire n’est pas vendeur de terres dont il tire un revenu. C’est lorsque les lopins de terre ne sont plus travaillés, n’ont plus d’utilité, que la tentation est forte d’en faire du terrain à bâtir.

Il y a bien longtemps que la petite et moyenne polyculture qui occupait tout l’espace a disparu. Sur Saint-Morillon subsiste de la viticulture et de la sylviculture.
Que peut-on envisager dans le domaine agricole ? Il faut être conscient que les sols de la commune : sables de la basse vallée du Gat-Mort, argiles affleurant sur les pentes et graves sur les parties hautes n’ont que de médiocres qualités agronomiques.
Il serait sans doute possible de développer une activités de maraîchage si utile dans la périphérie bordelaise et même localement mais ce ne serait pas sans quelques obstacles à surmonter :
- des zones propices restreintes (nous ne sommes pas dans les riches limons de la basse vallée de la Garonne),
- un problème de disponibilité et d’accessibilité à ces terres,

  • chères, les terres ne sont pas à la portée des candidats à l’installation,
  • bon marché, les propriétaires ne voient pas l’intérêt de s’en défaire,
  • quant à la location, ils s’en méfient comme de la peste..

Pour ce type d’activités à la rentabilité douteuse, une aide serait certainement plus qu’utile.
Ici comme ailleurs, les mêmes causes engendrent les mêmes effets et il ne suffit pas que les choses soient souhaitables ou regrettables pour trouver une solution.

Des problèmes nouveaux se poseront certainement avec la densification de l’habitat et la montée en puissance des programmes de logements sociaux avec des populations à revenus plus modestes. Baisse du pouvoir d’achat, accroissement des coûts de l’énergie poseront certainement le problème de populations moins mobiles, coincées dans des logements.
Saint-Morillon n’a pas su, lorsque c’était possible, se pourvoir d’espaces publics comme, par exemple, Castres avec le Bois de Savis. Son maillage routier est impropre à la circulation pédestre et, alors que la circulation sur les espaces privés pose de plus en plus de problèmes, le maillage des chemins ruraux est à l’abandon.

Ph. Delpech